

Benjamin jonglait avec le ballon, Julie jongle avec les bulles. En effet, cette entrepreneuse française s’est lancée en 2015 dans la culture du champagne en créant son entreprise Julie Nivet Champagne. C’est avec plaisir qu’elle a répondu favorablement à notre entretien en revenant sur sa vie d’entrepreneuse et sa vie de famille. Retour sur un parcours étonnant, au cœur du terroir français.
Bonjour, Julie et merci d’avoir accepté de répondre favorablement à notre demande. Avant d’aborder votre parcours, votre histoire, pouvez-vous revenir sur votre enfance et le contexte dans lequel vous avez grandi ?
Je suis née en 1978 en Bourgogne, j’ai eu une enfance heureuse à Auxerre avec mes parents et au milieu de deux frères.
Quelles sont les personnes qui vous ont inspiré dans votre jeunesse ?
Mes grands-parents maternels ont été un exemple de couple pour moi, ils étaient la définition même de l’amour. Et bien sur mes parents, mon papa grand amateur de vin m’a donné cette passion.
Comment le champagne et l’idée de travailler dans le vin a fait son chemin ? Était-ce quelque chose de naturelle ?
J’ai toujours baigné dans ce monde-là. Pendant ma scolarité sur Auxerre, j’ai rencontré mes amis, quasi tous enfants de vignerons. Ce sont encore aujourd’hui mes amis proches. C’est une histoire humaine avant tout. Nous avons grandi ensemble, j’ai appris le métier sur le tard, et ce sont eux qui m’ont inspirée, à qui j’ai demandé des conseils et qui m’ont dit de foncer dans ce projet.

Quel est votre parcours de formation ?
Après le bac, je suis partie sur Dijon faire mes études et j’ai obtenu une licence de Biologie.
La terre de champagne, est un métier de sommelier, où les femmes se font relativement rares. Comment l’expliquez-vous ?
C’était effectivement le cas il y a encore vingt ans, où les femmes étaient très rares dans le milieu viticole. En tout cas, elles n’apparaissaient pas au premier plan. Désormais, un tiers des exploitants viticoles français sont des femmes.

Combien de personnes travaillent avec vous ?
Nous sommes deux. Mon vigneron a une équipe soudée avec lui pour faire nos magnifiques cuvées, je suis tellement fière du travail qu’il fait et de la relation de confiance que nous avons. C’est ma plus belle rencontre professionnelle.
Quels sont les grains de raisin que vous utilisez pour l’élaboration du champagne ? Quelle est la particularité de votre champagne ?
Nous avons deux des trois cépages de la Champagne, Le Chardonnay et le Pinot noir. Dans chacune de mes cuvées, il y a toujours au moins 50% de Chardonnay.
Mon vigneron a une équipe soudée avec lui pour faire nos magnifiques cuvées, je suis tellement fière du travail qu’il fait et de la relation de confiance que nous avons. C’est ma plus belle rencontre professionnelle.
Vous proposez 5 cuvées : Le Brut JN, le champagne rosé, le Blanc de Blanc, le Ju10cieuse et la cuvée n°10. Pouvez-vous nous présenter ces différents champagnes ?
Oui, nous proposons cinq champagnes :
- Le Brut Cuvée 10 (50% pinot Noir / 50% Chardonnay) : Le nez est puissant et tendre à la fois, il révèle l’essence même du fruit mur. La bouche est enlevée sur un tutti frutti blanc et jaune.
- Le Brut JN (80% Chardonnay / 20 Pinot Noir) : Sa bulle est fine, dynamique et persistante. Sa dominance en Chardonnay vous laisse une note désaltérante d’agrume.
- La Cuvée Rosée (50% pinot Noir / 50% Chardonnay) : Le 1er nez est franc (fruits noirs et croquants) et le 2ème nez s’affine sur la fraîcheur de groseille et de framboise.
- La cuvée Blanc de blancs : (100% Chardonnay) : Sa bulle est fine et vive. Au nez, des notes florales d‘Aubépine, de glycine laissent place à un fruit blanc, frais et juteux.
- La Ju10cieuse (50% pinot Noir / 50% Chardonnay) : Il s’agit de notre cuvée d’exception, vieillie 9 mois en fût puis 4 ans en cave. Au nez, c’est une dualité entre fruits et épices qui fait penser à une compote de pêche poire. En bouche, la poire prend légèrement le dessus mais les épices et agrumes lui donnent sa profondeur

Quels seraient les associations/choix de vos cuvées pour un repas entier (apéritif, repas, desserts) ?
Pour commencer, je conseille un Brut (cuvée 10 ou JN). Pour le repas, un Blanc de blancs qui avec ses bulles fines et ses notes d’agrumes, s’accorde avec beaucoup de plats. Enfin pour le dessert, je conseille toujours du Champagne Rosé qui se marie parfaitement bien avec le sucre des desserts. Pour les plus connaisseurs, il y a la Ju10cieuse qui peut très bien terminer un repas.
Au-delà du produit, vous mettez un point d’orgue à valoriser le contenant, avec de superbes bouteilles. Pouvez-vous revenir sur l’habillage original des bouteilles ?
Effectivement, mon objectif était de mettre en valeur le flacon de ce produit exceptionnel qu’est le Champagne. En effet, j’ai souvent dégusté des merveilles mais où l’esthétique de la bouteille ne me plaisait pas. J’ai toujours aimé offrir du Champagne et si le contenant est aussi beau que le contenu, c’est mieux n’est ce pas ? Ainsi toutes mes bouteilles sont étiquetées manuellement avec un habillage en Croco. Chaque carton se compose d’une bouteille avec un bijou, emballée dans du papier de soie pour pouvoir l’offrir.
Toutes mes bouteilles sont étiquetées manuellement avec un habillage en Croco. Chaque carton se compose d’une bouteille avec un bijou, emballée dans du papier de soie pour pouvoir l’offrir.
Depuis le début de mon activité, je ne travaille que par le bouche à oreille. La plupart de mes clients sont des entreprises qui veulent se différencier. Ainsi, je propose une personnalisation des bouteilles avec une photo, un message ou un logo.
Vous êtes en collaboration avec un graffeur. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Comme pour mon vigneron, Rise up est une des belles rencontres de mon métier. Nous nous sommes rencontrés par le biais de l’association Les Arts Confondus dont nous faisons partis tous les deux. Nous avons travaillé pendant plus d’un an pour trouver notre style, et cela ne fait que quelques mois que nous commercialisons les bouteilles graffées en coffret. Nous avons déjà de grands projets en cours, suivez-nous sur les réseaux vous découvrirez cela bientôt.

J’imagine que cette approche moderne détonne dans un milieu relativement conservateur. Quels en sont les retours ?
Nous n’avons que de supers retours. Les gens sont curieux et adhérent complètement à ce concept, que ce soit pour les entreprises qui nous donnent leur charte graphique afin de préparer des séries limitées pour leurs clients ou bien pour les particuliers pour les mariages ou événements importants.
La cuvé numéro 10… Difficile de ne pas y voir une référence à votre mari Benjamin, ancien joueur de football professionnel passé par Auxerre, Châteauroux, Caen et Troyes. Dans quelles circonstances vous rencontrez-vous ?
La cuvée 10 a deux significations : le 10 de l’ Aube car mon projet initial était de mettre en valeur le champagne de l’Aube et effectivement le 10 du numéro de maillot de mon mari. Nous nous sommes rencontrés adolescents quand il était au centre de formation d’Auxerre, ses cours de physique se passaient dans mon lycée. Par ailleurs, mon papa était, à l’époque, médecin de l’AJA. Guy Roux, qui me connaissait depuis toute petite, avait fait son enquête… C’était un vrai père pour tous ses joueurs.

Par la suite, je suis partie faire mes études sur Dijon et je rentrais tous les weekend pour être avec Benjamin. Puis, je l’ai enfin rejoint à Châteauroux pour 6 mois et après nous sommes partis sur Troyes. Nous nous sommes mariés à Chablis, dans les vignes, chez notre ami Julien Brocard et avons eu notre premier enfant dans la foulée.
Footballeur est un métier à part, avec beaucoup de déplacements les weekends. Expliquez-nous un peu ce quotidien et cette vie de famille particulière ? Comment développer sa carrière professionnelle quand son mari est footballeur ?
Pour moi, cela a été un vrai bonheur de pouvoir élever mes trois enfants et m’occuper de mon mari pendant sa carrière, car je pense que l’ équilibre familial est primordial pour un sportif de haut niveau. J’ai voulu travailler quand notre dernier enfant est entré à l’école primaire.
Comment viviez-vous les périodes de mercato, avec un conjoint susceptible de déménager pour pouvoir évoluer dans un autre club ?
La chance que nous avons eue est de ne pas avoir trop déménagé. Benjamin est toujours resté longtemps dans chaque club et n’a fait que quatre clubs. A chaque déménagement, c’était une belle expérience pour toute la famille et nous sommes toujours accueillis les bras ouverts partout où il a évolué.
Les supporters oublient souvent que dernière un choix sportif, il y a aussi un choix familial. Dans quelle mesure son choix de carrière a influencé/et ou retardé votre carrière professionnelle ?
Ma vie de famille est toujours passée avant tout et j’ai décidé de commencer mon activité quand nous étions tous prêts. Nous en avons beaucoup parlé avec Benjamin et il m’a toujours soutenu, comme moi j’ai pu le faire pendant sa carrière.
Et inversement, dans quelle mesure l’idée de travailler dans le champagne a eu un impact sur sa carrière professionnelle sportive ? Son transfert de Caen à Troyes en 2013 et ce rapprochement en champagne est-il en lien avec votre début d’activité quelques mois plus tard ?
Non pas du tout, notre retour à Troyes était un choix purement sportif. Benjamin avait décidé de retrouver l’entraîneur qu’il aimait tant, Jean-Marc Furlan, pour finir sa carrière à Troyes. De mon côté, j’ai toujours voulu travailler dans le vin mais je ne savais pas de quelle façon. Le destin a fait que nous sommes retournés en Champagne…
Avec 655 matchs professionnels au compteur, votre mari a fait une carrière d’une longévité exceptionnelle débutée en 1997, en étant épargné par les grosses blessures. Le champagne est-il le secret de cette longévité (rires) ?
(Rires) ! Pas de champagne ni de vin blanc pendant sa carrière. Pourtant, il est un grand amateur de vin comme moi. Mais il se rattrape maintenant.

Plus sérieusement, à quoi attribuez-vous cette carrière ?
Je l’attribue à sa détermination, à son hygiène de vie irréprochable, à son incroyable amour pour le football, au respect qu’il a eu durant sa carrière envers ses coéquipiers ses entraîneurs, dirigeants et supporters.
Beaucoup d’observateurs s’accordent pour dire que Benjamin Nivet n’était pas considéré à sa juste valeur, et aurait pu jouer encore à un plus haut niveau. Etes-vous d’accord ?
Benjamin a toujours dit « On a la carrière que l’ on mérite » . Pour moi, il ne faut pas avoir de regret dans la vie, il a vécu de belles émotions et quand je vois encore les gens l’admirer autant après sa carrière, je sais que c’est la plus belle récompense qu’il peut recevoir.
On sous-estime l’entourage dans le sport de haut niveau, dans les moments où la réussite est moins au rendez-vous ou dans une saison compliquée. Avez-vous des souvenirs particulièrement difficiles en tête ?
Bien sur qu’il y a des très hauts et des très bas dans une carrière. Mais, il a toujours réussi à couper du football quand il rentrait à la maison. Les enfants et moi étions là pour lui, quel que soit le résultat du match. Cette stabilité nous a permis de gérer au mieux les aléas du football.
Les enfants et moi étions là pour lui, quel que soit le résultat du match. Cette stabilité nous a permis de gérer au mieux les aléas du football.
Aviez-vous noué des relations d’amitié avec les compagnes de certains coéquipiers de votre mari ?
Oui de très fortes amitiés, dans les quatre clubs que nous avons faits. Nous avons aujourd’hui des amis sincères et fidèles.
Quel est le meilleur souvenir sportif vécu ensemble ?
Il y en a plusieurs : Je dirais :
- A Châteauroux, la Coupe de la Ligue en 2000, marquée par une magnifique aventure avec une forte amitié dans l’équipe et des moments inoubliables.
- Puis, la première montée en Ligue 1 avec Troyes en 2005. C’était improbable mais ils l’ont fait avec Jean-Marc Furlan comme entraîneur et le petit « Blaise » (NDLR : Matuidi).
- Le maintien en ligue 1 avec Caen contre l’OM en 2011, avec une belle fête entre joueurs. On n’avait pas dormi de la nuit.
- Dernièrement, la montée au barrage avec Troyes ou Benj marque à la dernière minute. C’était magique .
Et enfin, le dernier match de sa carrière où tout le stade, toute la ville, nos amis, notre famille ont fêté cela en communion. Il a reçu ce soir là tellement d’amour. On s’en souviendra toute notre vie .
Aujourd’hui à la retraite, dans quelle mesure Benjamin vous soutient-il dans votre activité ?
Il me soutient à 100% et parfois me fait des livraisons au grand plaisir de mes clients.

Qu’est-ce que nous pouvons nous souhaiter ?
Que je continue à m‘épanouir autant dans mon métier. Pour rien au monde, je ne changerais ma vie personnelle et professionnelle, je sais la chance que j’ai.
Une autre chose qui vous tient à cœur que vous souhaiteriez ajouter ? Pouvez-vous nous parler de vos engagements associatifs par exemple ?
Personnellement, je soutiens Les Arts Confondus, une association qui permet de promouvoir des artistes de tout horizon, de rendre l’art et la culture accessibles à tous, tout en aidant les enfants atteints d’autisme. Je soutiens également l’Assofrani dont mon mari est parrain depuis plus de 13 ans. Il s’agit d’une association de solidarité franco nigérienne dont le but principal est de faciliter l’accès à l’eau des populations du Niger dans les zones où les habitants ne disposent d’aucun point d’eau potable à proximité. A ce jour, plusieurs puits ont été construits grâce à l’association qui essaye de se rendre sur place une fois par an.
Nous remercions chaleureusement Julie pour sa disponibilité et lui souhaitons toute notre réussite dans ses projets futurs. Nous vous invitons à visiter son site et à la suivre sur Twitter.
JM