
J’entends jusqu’ici le cri de joie de tous les suiveurs du foot français qui n’ont certainement pas vu jouer l’Ukraine depuis l’Euro 2012. Remettons un peu de perspective dans tout ça et essayons de présenter cette équipe d’Ukraine.
Tout d’abord, il faut que les Français oublient le match de l’Euro 2012. Match décalé, ambiance retombée, l’Ukraine n’a pas su gérer les événements et l’orage. Depuis, la sélection a bien grandi.
Un parcours presque parfait
Demandons donc à l’Angleterre si l’Ukraine est un si bon tirage que cela. Incapables de battre les coéquipiers de Tymoschuk, les anglais étaient d’ailleurs passés très proches de la défaite lors du match aller, arrachant l’égalisation dans les dernières minutes. Derrière, l’Ukraine a dû faire face à la démission de son sélectionneur, Oleg Blokhin, parti rejoindre à temps plein le Dynamo Kiev. Il s »en est suivi une période de flottement au sein de la sélection, flottement qui coûte cher à l’heure des bilans. En effet, le match nul contre la Moldavie et la défaite contre le Monténégro ont été concédés alors que l’actuel sélectionneur, Mikhaylo Fomenko n’était pas encore en place.
Depuis la nomination de Fomenko à la tête de la sélection, tout va pour le mieux. L’Ukraine a battu deux fois la Pologne, a étrillé Saint-Marin comme il se doit et obtenu un nul quelque peu décevant face à l’Angleterre. Mais s’il fallait retenir un match de la campagne de qualification ukrainienne, ce serait le match au Monténégro. Réduit à 10 peu avant la mi-temps suite à l’expulsion de son avant-centre, Roman Zozulya, l’Ukraine a su faire front et étriller le Monténégro sur le score de 4-0, les Monténégrins finissant le match à 9.
Aussi paradoxale que cela puisse paraître, l’expulsion de Roman Zozulya aura été des plus bénéfiques. L’équipe en ressort plus soudée que jamais. Au final, l’Ukraine échoue à un petit point de l’Angleterre, mais parvient à obtenir le statut de tête de série. Un standing qui ne sert à rien, puisque l’Ukraine se retrouve à affronter l’épouvantail des non tête de série : la France.
L’Ukraine sûre de sa force …
Face à des « petites » équipes, Fomenko n’hésite pas à mettre en place un 4-4-2 ultra offensif. Mais, à l’image du match face à l’Angleterre ou la Pologne, dès que l’adversaire monte en grade, l’équipe passe à un 4-3-3 plus sécurisant. C’est d’ailleurs, un reproche qui pourrait être fait à Fomenko tant il a semblé frileux face aux anglais, se contentant du match nul.

Mis à part Tymoschuk, reparti au Zenit, tous les titulaires potentiels évoluent dans un des 4 gros clubs du pays, à savoir le Shakhtar, le Dynamo, le Metalist et le Dnipro.
Offensivement, l’Ukraine n’a rien à envier à bon nombre d’équipes nationales. L’Ukraine dispose de 3 vrais avants-centres qui ont chacun leurs caractéristiques : Roman Zozulya (Dynamo), Evhen Seleznyov (Dnipro) et Marko Devic (Metalist). Tous sont en grande réussite depuis le début de la saison, particulièrement Devic qui semble inarrêtable depuis son retour au Metalist début 2013. Mais Fomenko semble préférer s’appuyer sur le chien fou Zozulya. Roman ne paye pas de mine à première vue, mais c’est un chien enragé, probablement l’avant-centre qui prend le plus de carton en championnat. Il ne rechigne jamais à la tâche, encore moins à un bon tacle, qu’il soit sur la cheville ou sur le ballon, peu importe. Mais c’est surtout un excellent joueur de tête.

Sur le côté, probablement inconnus du grand public, Andriy Yarmolenko (Dynamo) et Evhen Konoplyanka devraient poser beaucoup de problèmes aux deux latéraux français. Qualité de dribble, qualité de centre, qualité de frappe, si ces deux joueurs sont encore dans leur club respectif, c’est parce que ces clubs ont les moyens de les conserver. Ainsi, il faudrait débourser pas moins de 40M€ pour arracher Konoplyanka au Dnipro.

Voilà pour la force offensive de l’Ukraine. Étonnamment, les statistiques sont tout aussi favorables sur l’aspect défensif. Avec seulement 4 buts encaissés dans une poule comprenant l’Angleterre, la Pologne et le Monténégro, il serait fou de ne pas trouver cette statistique significative.
Devant Pyatov (Shakhtar) dans les buts, la charnière composée de Evhen Khacheridi (Dynamo) et Yaroslav Rakitskiy (Shakhtar) est inamovible. Sur les côtés, Shevchuk (Shakhtar) à gauche et Fedetskyi (Dnipro) à droite ont fait leur preuve avec la sélection. Étant donné l’apport de Yarmolenko et Konoplyanka, leur tâche offensive est assez limitée.
Sur le papier, cette défense tient la route, mais n’est pas entièrement rassurante. C’est pourquoi, Fomenko installe un milieu à 3 lors des gros matchs. Et pour composer ce milieu à 3, il dispose de plusieurs options. A priori, Edmar (Metalist) et Rotan (Dnipro) semblent indiscutables et apportent surtout l’expérience nécessaire devant une charnière assez jeune (Rakitskyi a 24ans, Khacheridi, 26 ans). A noter que Rotan apporte toute sa qualité sur les coups de pieds arrêtés, notamment en direction de Zozulya qu’il connaît par cœur. Le troisième larron du milieu peut, selon l’état de forme et la volonté de jouer bas ou non, être soit Tymoschuk (Zenit), soit Stepanenko (Shakhtar) pour un choix défensif, soit Gusev pour un choix un peu plus offensif.
… mais outsider
Malgré tous ces points positifs, l’Ukraine ne part par favorite de cette confrontation face à l’équipe de France. L’équipe a mûri depuis 2012 mais manque clairement d’expérience des grands rendez-vous, de vécu du très haut niveau international. Peut-on affirmer que les jeunes stars Yarmolenko et Konoplyanka joueront à leur niveau pour un match aussi important ? Difficile à dire. J’ose l’espérer tant j’aime ces deux joueurs. Yarmolenko aura un rôle primordial sur le côté droit. A lui de profiter de la relative faiblesse défensive de Patrice Evra, mais il devra également aider Fedetskyi qui sera aux prises avec un Ribéry plus fort que jamais sous le maillot bleu. La charnière aura fort à faire face à Giroud mais que ce soit Khacheridi ou Rakitskyi, les deux aiment le combat. Le milieu ukrainien devra être extrêmement concentré, venir en aide sur le côté droit afin de bloquer Ribéry, harceler le milieu français et surtout ne pas perdre le ballon trop vite. Pour cela, l’expérience de Ruslan Rotan sera un apport considérable.
Les derniers matchs de l’équipe de France sont plutôt encourageants, mais aucun adversaire des bleus n’avait le niveau de cette équipe d’Ukraine. La Finlande a, par moment, montré que l’équilibre restait très précaire dans l’arrière garde tricolore. L’Ukraine devra s’engouffrer dans ces failles. En charnière, un Eric Abidal pourrait énormément souffrir face à l’impact physique et le jeu de tête de Zozulya. Sur les côtés, Evra et Debuchy devront être au top pour contrôler Yarmolenko et Konoplyanka, en espérant que leur milieu respectif fasse le travail défensif.
En fait, ce sont toutes les incertitudes concernant l’équipe de France qui me laissent à penser que l’Ukraine a vraiment sa chance. Qui sera le milieu droit ? Si c’est Valbuena, ses faiblesses tactiques, notamment dans le replacement défensif, pourrait profiter à Konoplyanka qui se retrouverait un 1 contre 1 face à Debuchy. Quel sera le milieu français ? Un milieu à 3 dans un 4-3-3 ou à 2 dans un 4-2-3-1 ? La paire Pogba-Matuidi n’a pas convaincu. Il existe la possibilité de faire jouer Cabaye, un élément important dans la possession du ballon qui pourrait faire défendre l’Ukraine. Mais attention aux contres redoutables de l’équipe Ukrainienne.
La France a évité le Portugal et la Croatie, est censée être supérieure à son adversaire, mais l’Ukraine a de vrais arguments à faire valoir et pourrait surprendre plus d’un observateur.
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